Les génies décisifs : Django Reinhardt

pascal anquetil

Le blog est heureux et fier de pouvoir publier les merveilleux textes d’une des plus belles plumes du jazz : Pascal Anquetil

Ces 8 premiers textes sont extraits de la publication » Portraits légendaires du jazz » (éditions Tana).

DJANGO REINHARDT : L’étoile filante dans le grand bleu des « Nuages »

Django Reinhardt : 23 janvier 1910 à Liberchies (Belgique) – 16 mai 1953 à Samois/Seine

À une femme naïve qui s’étonnait qu’il ne sache pas lire la musique, Django répondit pince-sans-rire : « Pourquoi ? Cela s’entend ? »  Et d’ajouter avec superbe : « Je ne connais peut-être pas la musique, mais la musique, elle, me connaît. ». Toute sa vie, toute sa musique le prouve avec éclat.Au commencement, il y a Django. Dans la langue des Manouches, ce prénom rare signifie : « je réveille ». Explorateur d’un  monde nouveau et inventeur d’un langage devenu l’expression identitaire de toute une communauté, Django Reinhardt, c’est d’abord cet « accident génial » (selon les mots de Franck Ténot) dû à la collision improbable de deux trajectoires : une histoire et un destin, une musique jeune venue d’outre-Atlantique et un artiste neuf issu d’un peuple nomade. De cette rencontre naîtra au début des années 30 ce que l’on a d’abord appelé « l’école tsigane du jazz » avant de devenir aujourd’hui le jazz manouche. 

django Reinhardt
Django Reinhardt

Manouche par le sang et Français par le cœur, fantasque, extravagant et imprévisible, célèbre par ses foucades, absences et retards, joueur et grand seigneur, Django fut d’emblée ce génie lumineux, le premier « guitar hero » de tous les temps et sur tous les temps. Un géant dans le siècle. Génial, parce qu’inexplicable. Magique par sa manière unique de marier avec désinvolture les contraires : le charme et la violence, la volubilité et l’économie, la rigueur rythmique et la fantaisie mélodique. Il y a un « son Django », immédiatement reconnaissable, que Cocteau appela « cette guitare à voix humaine ».Une voix si forte, si présente qu’elle reste toujours un mystère. 

La musique de Django fut tout de suite nouvelle et sera jusqu’à sa mort toujours renouvelée. Fruit d’une patiente évolution, d’une perpétuelle remise en question du guitariste par lui-même, elle semble naître du plus souverain dédain pour tout ce qui a pu la précéder. Elle invente dans l’instant sa propre légitimité en refusant tous les pièges de la réminiscence. Toujours se surprendre, jamais se répéter, telle fut sa règle d’airain.

L’ironie de l’histoire a voulu que ce grand libérateur soit trop souvent célébré par des partisans de la servilité. Dans la famille des « héritiers », on trouve tous les cas de figure : les épigones plagiaires, les revivalistes intégristes, les « copycats » (comme disait Lester Young ) chez qui le culte de la répétition va toujours de pair avec la répétition du culte. Heureusement, aujourd’hui le risque de « folklorisation ethnique » du jazz gitan semble enfin évité par tous ces guitaristes (principalement Biréli Lagrene) qui préfèrent la référence à la révérence, l’évolution à la dévotion. Tous ces « disciples » indisciplinés sont pour beaucoup dans le retour de flamme du jazz manouche. Comme l’a écrit Cioran : « Peuple authentiquement élu, les Tsiganes ne portent la responsabilité d’aucun événement ni d’aucune institution ; ils ont triomphé de la terre par leur seul souci de n’y rien fonder. » À l’exception de cette « invention » imprévisible, le seul apport vraiment original que la vielle Europe ait offert au jazz : la musique de Django.

How High The Moon. Django Reinhardt 1949 Rome

Interview en podcast de Gilles Réa

Gilles Réa est un musicien, guitariste et pédagogue, discret et humble, peut-être trop discret et trop humble… C’est de mon point de vue, un des guitaristes importants du paysage jazzistique Français, par la fluidité de son discours, et la grande culture qui le nourrit. Mais c’est aussi un homme passionné par la transmission. Il enseigne depuis de nombreuses années, et nous aurons le grand plaisir de l’accueillir en octobre 2023 à Angers pour un stage de guitare jazz d’accompagnement, et un concert.

Gilles Réa
Gilles Réa

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Lien vers le stage de guitare d’accompagnement en Octobre 2023 à Angers avec Gilles Réa

Interview de Robin Nitram

Guitariste et compositeur de la jeune génération, Robin Nitram sort ces jours-ci un album avec le Motto Trio : « Vroum Vroum ». Il répond aux questions de Docteur Jazz.

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DJ : Bonjour Robin, peux-tu te présenter ?

RN : Je m’appelle Robin Nitram et je suis guitariste et compositeur. J’ai étudié le jazz ainsi que l’arrangement et la composition à l’International Music Educators of Paris (IMEP) durant cinq années (de 2011 à 2016) avec notamment Rick Margitza, Chris Culpo et Peter Giron puis deux autres années au CRR de Paris (de 2016 à 2018) pour me perfectionner aux côtés de Manu Codjia, Pierre Bertrand, Emil Spanyi… 

DJ : Quelles sont tes principales influences ?

RN : Musicalement je suis très influencé par l’esthétique du label allemand ECM et aussi par le jazz qui est joué à Chicago notamment avec la AACM et le label International Anthem. Je suis aussi beaucoup influencé par mes voyages au Vietnam, en Europe et aux États-Unis, j’ai rencontré pleins de gens et vécu des expériences incroyables. Et enfin, mes collègues musiciens, ma famille et mes amis. J’ai vraiment l’impression d’être entouré de belles personnes et c’est une chance inouïe. 

DJ : Un mot ou une phrase pour définir le jazz ?

RN : Controlled Freedom. Que je traduirai par liberté réfléchie. C’est à dire qu’on est libre de faire ce qu’on veut mais on a pleinement conscience que c’est un équilibre constant vis à vis de la conception de la liberté qu’ont les autres aussi. Il y a beaucoup de bienveillance dans cette phrase (qui est d’Herbie Hancock).

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Stage/Workshop jazz classique Ascona 2021

J’ai eu le grand plaisir d’animer, en compagnie de quelques collègues talentueux, le 25ème workshop de jazz classique à Ascona (Suisse Italienne) en cette première semaine de novembre 2021. Un grand plaisir de pouvoir échanger à nouveau en « live » avec les étudiants. J’étais en charge des guitaristes et banjoïstes.

Au programme : l’étude de quelques standards, souvent joués avec des mélodies et harmonies erronées. Ce qui dérange, n’est pas tant que ces standards soient modifiés (ce qui semble naturel au fil du temps et de l’évolution du jazz et de son harmonie), mais plutôt la méconnaissance, voire l’ignorance de ces pièces, telles qu’elles ont été écrites par leurs compositeurs, avec leurs chemins harmoniques et astuces, qui donnent souvent toute l’originalité à ces chansons (90 % des standards de jazz sont à l’origine, des chansons écrites pour Broadway 1920-1940).

Libre ensuite, à tout un chacun, en connaissance de cause, de modifier ou arranger les mélodies, les harmonies… Nous étudions ici, des grilles « consensuelles » qui peuvent permettre, notamment en jam session, de se retrouver sur un standard en jouant les mêmes harmonies que le voisin ! 😉

Il s’agit ici de la version Mulligan/Baker quartet sans piano ni guitare…Le contrepoint Sax/Tp/Bass fait clairement entendre les enchaînements d’accords

La grille originale fait plutôt entendre F-Dm7-Gm7-C7 sur les deux premières mesures…


Beaucoup d’options possibles sur ce morceau de Duke… Ici, une grille « usuelle »

On remarque sur ce morceau très très joué en jazz « Trad » le Gb7 à la fin du A, qui apporte toute l’originalité. On remarque aussi que contrairement à ce que tout le monde fait, il n’y a pas de Ab7 à la mesure 4 du B. La mélodie faisant entendre sur G7, la quinte augmentée, la tierce et la quinte. Le fait de « suivre » la mélodie avec un Ab7, annihile totalement l’effet…

L’astuce (jamais jouée) dans ce morceau, réside dans ce E7 joué à la mesure 5 (On joue souvent à la place un D7, ou l’on reste sur le F)

Voici une réaction/explication de mon ami et collègue Cyril Achard (grand harmoniste)

« Ici, E7 n’est pas en fonction harmonique mais mélodique bien sûr.
C’est un accord d’approche de IIm7, à la faveur d’une progression chromatique des voix.
Les boppers ont popularisé cet évènement comme suit : (IIIm7) – bIII°7 – IIm7.

Ici, le compositeur aurait pu conserver le degré I sur la totalité de la mesure, il a choisi de dynamiser l’approche de IIm7, par l’ajout de VII7.
Il aurait très bien pu conserver une pédale de fa avec E/F vers Gm7
.

VII7 et bIII°7 vers IIm7, expriment le même phénomène de sensible descendante (j’ai trouvé cela très tôt chez Haendel) :
VII7 (E7) aux voix supérieures, bIII°7 (Ab°7) à la voix basse.

Dans tous les cas, ce qui se joue ici est la résolution descendante du sol# (lab) vers sol becarre, et l’approche du sib par le si bécarre.

Le problème, c’est que le thème fait entendre la sensible du ton : la note mi est bien moins harmonisée avec le diminué d’approche (Ab°7)
qu’avec sa dominante racine E7.
Hoagy Carmichael, conserve l’idée de l’accord d’approche, mais avec une « pente abrupte » à la voix grave : le saut de tierce ascendant.

Autant le dire, pour moi E7 n’a aucun sens: il s’agit avant tout d’un phénomène linéaire.« 


Ici encore, certaines progressions ont été modifiées au fil du temps et sont devenues la norme admise et jouée par la majorité (Mesures 1 et 2) et certaines astuces ont disparu (par exemple, la substitution de la mesure 5 qui existe dans la partition d’origine)

Henri Salvador dilemma…

Henri SALVADOR (1917-2008)

Alors, certains me diront : mais que vient faire un article sur Henri Salvador dans un blog de jazz ?

Eh bien ceux-là de toute évidence, ne connaissent pas l’album « Salvador plays the blues », enregistré en 1956 sous l’impulsion de Boris Vian.

Henri Salvador est catalogué (à juste titre, soyons honnêtes) comme chanteur fantaisiste, notamment au regard de la carrière qu’il a menée sous le pseudonyme d’Henry Cording, tant à la télévision qu’au travers de sa production phonographique, du milieu des années 50 jusqu’au milieu des années 70.

Il n’en reste pas moins, qu’à l’instar de Sacha Distel, il est l’un des grands guitaristes de jazz Français des années 50/60. Le style d’Henri se rapproche volontiers de l’esthétique de Django « électrique » (dont il était un fan absolu), celui de Sacha étant plus proche des « boppers » comme René Thomas ou Barney Kessel.

A gauche : Henri avec une Di Mauro swing chorus (vers 1940). A droite : Henri avec une Gibson es 300 (vers 1955)

Né à Cayenne le 18 juillet 1917, Henri débarque avec toute sa famille en 1929 au port du Havre. Il chante en duo avec son frère aîné, André et se produit dans les cabarets Parisiens. En 1935, alors que le duo joue au « Jimmy’s bar », Django Reinhardt remarque Henri et l’engage aussitôt comme accompagnateur. Il sera ensuite recruté comme guitariste dans l’orchestre de Ray Ventura (L’oncle de Sacha Distel…tiens tiens…), qui le remarque alors qu’il est chanteur d’orchestre à Nice. Il y officiera de 1941 à 1945 et participera avec cet orchestre, à une grande tournée en Amérique du Sud. 

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Interview de Christophe Davot

Christophe Davot, guitariste, banjoïste et vocaliste de grand talent, répond aux questions de Docteur Jazz, et nous présente son projet « Paris Gadjo Club ».

DJ : Bonjour Christophe, peux-tu te présenter ?

CD : Je suis guitariste, banjoïste, chanteur, interprète, arrangeur, compositeur et preneur de son. 

DJ : Quelles sont tes principales influences ?

CD : Grâce à mes parents et frères et sœurs j’ai eu la chance de baigner dans différents univers de bonne musique depuis ma plus tendre enfance. Cela va de la musique classique jouée par ma mère pianiste (1er prix de conservatoire), aux musiques jazz, folk, pop, la chanson francophone bien-sûr et la musique latine entre autres styles. En ce qui concerne plus précisément le jazz, c’est mon oncle guitariste Anglais Tony Male qui m’a transmis le virus de Django Reinhardt quand j’avais 13-14 ans . Il était lui même un excellent guitariste ami de Joe Pass, capable de jouer à la note les solos du géant manouche. J’aime autant vous dire que ça marque au fer rouge la mémoire d’un ado et ça a orienté mes choix par la suite.

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L’accompagnement jazz à la guitare.

J’étais l’invité du guitariste Wilfried Voyer sur sa chaîne YouTube, pour parler d’accompagnement jazz…

Wilfried propose sur sa chaîne YouTube, d’excellents tutos, qui concernent majoritairement le jazz manouche ! mais pas que… Je vous invite à aller les découvrir !

Une petite formation est également à votre disposition sur le blog, si vous désirez approfondir le sujet : « Accompagner le jazz à la guitare »

Interview de Cyril Achard

Guitariste et pédagogue depuis le milieu des années 90, Cyril Achard présente et partage sa passion et sa science de l’harmonie, au travers de publications passionnantes et d’un site web. Docteur Jazz avait envie de mettre en valeur son travail exceptionnel sur le sujet, et de l’associer à la formation sur l’ARRANGEMENT JAZZ proposée par le blog, tant la complémentarité des deux approches semble évidente.

Cyril a bien voulu répondre à quelques questions !

 Bonjour Cyril, peux tu te présenter ?

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La guitare dans le jazz

LA GUITARE DANS LE JAZZ

Les origines de la guitare remontent si loin, que l’histoire serait trop longue à raconter ici. On peut seulement rappeler, pour replacer l’instrument dans le monde de la musique, que sa forme moderne est apparue (après différentes évolutions) en Espagne vers le treizième siècle. Guitare Latine : « Corps incurvé à long manche ». Déjà habituellement jouée avec un plectre, elle détrône rapidement le luth, pour devenir au début du seizième siècle, l’instrument roi dans les salons et pour faire la cour (Le dictionnaire de la musique de Jean-Jacques Rousseau au XVIIème la désigne comme un instrument portatif pour accompagner le chant). Très en vogue en Europe du nord au début du XIXème, elle sera bientôt supplantée par le piano, dans les salons à la mode comme chez les particuliers.

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Interview de Daniel Givone

“Retrouvailles” au théâtre d’Angers en Octobre 2020, avec cette figure du jazz Français ! Guitariste inclassable (bien qu’imprégné de la culture Manouche), curieux, aventureux, aimant le partage et les gens en général… Musicien très sensible et attachant, Daniel Givone répond aux questions de Docteur Jazz, dans les loges!… (les extraits sont tirés de son album solo “Different Strings”).

Interview de Félix Hunot

Guitariste et banjoïste de talent, Félix Hunot évolue essentiellement dans le milieu du jazz classique. Il sort le premier album sous son nom: “The Jazz Musketeers”. Un excellent investissement à Noël, pour faire découvrir le jazz classique “haut de gamme” Français à vos proches !