Découverte du SCAT par la vocaliste Karine Gene « Sula »

Karine GENE « Sula », passionnée de chant, chanteuse et formatrice.

Karine a commencé sérieusement l’apprentissage du chant, de la théorie musicale et de la scène, à Londres avec des cours du soir au Goldsmiths College, dans les années 2000. Depuis, elle a évolué dans divers groupes (reggae, blues, jazz, ballades d’Afrique de l’Ouest, rock). 

Elle accompagne les chanteurs en devenir à travers le blog  « Plus que du chant » Le but de ce blog, est d’apprendre à chanter et à développer son univers musical : cela implique d’acquérir ou de développer la confiance en soi, d’identifier ses goûts, de découvrir les pratiques du chant au travers de divers styles musicaux, de dépasser ses a priori et limites, de s’autoriser à chanter en langues étrangères… Tout cela en plus du travail pur de la technique vocale. Tout ce par quoi elle est passée…

Voici son témoignage sur l’univers du SCAT. Elle vient de commencer la formation sur le Scat, proposée par le blog, et nous fera part de son expérience d’apprentissage… A suivre donc !

Mon premier cours de scat

Je viens partager avec vous mes pensées, juste avant mon premier cours de scat, il y a une vingtaine d’années…

Dans cinq minutes, mon premier cours de scat va commencer. Ce qui m’a amenée devant la porte de ce cours de chant ?  Mon besoin d’aller plus loin dans l’apprentissage du jazz. Mon désir de raconter sans mots et de donner une nouvelle forme sonore à mon imagination.

Il y a un sentiment de facilité lorsque l’on écoute le scat d’Ella FITZGERALD. La fluidité, l’expression personnelle dans la suite d’onomatopées a l’air si naturelle, qu’elle semble innée, comme si elle n’avait jamais été apprise. Et puis on essaie : et là certaines syllabes ne marchent pas, le scat ne sonne pas et devient énigmatique !!!  On choisit alors de se faire aider.

1) Comprendre le scat.

Histoire du scat.

Le scat est un style vocal du jazz dans lequel les paroles sont remplacées par des syllabes et des onomatopées. La légende dit qu’il aurait été créé par Louis ARMSTRONG : pendant l’enregistrement de Heebie Jeebies, la feuille du texte de la chanson serait tombée et ARMSTRONG aurait improvisé en onomatopées. La vérité est que Louis ARMSTRONG l’a popularisé et d’autres, comme Sarah VAUGHAN et Al JARREAU l’ont mis plus tard à leur goût.  Le scat était présent depuis bien plus longtemps. On cite dans les années 20 Don REDMAN avec My papa doesn’t two time ou encore Four or five times

Simple complexité.

On entend souvent que scatter, c’est utiliser sa voix comme un instrument. Est-ce vraiment ainsi qu’il faut le concevoir pour réussir ? Le scat exige d’acquérir un vocabulaire de voyelles et de consonnes qui sont plutôt similaires aux tons et articulations des instrumentalistes de jazz.  Tout devient clair en écoutant Boby McFERRIN. Mais pas si simple…Confused smile

 Bobby MC FERRIN  Thinkin’ about your body.

2) Comment ça marche ?

Le rythme, swing et phrasés.

Rythmes binaire et ternaire : je devrai les intégrer et même savoir passer de l’un à l’autre. Je pourrais utiliser mon corps pour les ressentir, mes mains pour marquer le temps. Je m’attends à ce qu’on y passe du temps avant que je puisse me lancer. Et puis, il me faudra swinguer pour que tout cela sonne. Qu’est-ce que le swing? C’est cette régularité du rythme combinée à des variations complexes de pulsation que l’on retrouve dans le blues, la soul et le gospel. On ne peut y échapper pour obtenir des phrasés qui épousent avec imagination la structure musicale. Oui mais…. il reste la question de la couleur musicale que produisent les accords du jazz !!!

Gammes et accords.

Au-delà des rythmes et phrasés, il faut bien entendre la couleur des accords du jazz et être si à l’aise avec eux que le questionnement n’a pas de place. Je m’attends à ce que l’on me présente les différents types de gammes (majeures, mineures, blues, pentatoniques …), les accords de 7ème, les diminués et que je tende l’oreille pour en extirper les délicates nuances. Je dois d’abord entendre pour dire, sans mots. Cela passera par des exercices où je jouerai au funambule et où précision et justesse seront de mise ! 

D’où l’importance d’une routine de chant solide pour se lancer en toute connaissance de cause ! (Lisez l’article ).

Les bonnes onomatopées.

Avec le scat, on vocalise avec des syllabes ou onomatopées mais selon son propre style et le morceau choisi. Sur le morceau Lullaby of Birdland, Dee Dee BRIDGEWATER semble préférer les doubadoubadou et ti-ti-ti-ti. Sur Scat blues Sarah VAUGHAN enchaîne les chabidoubidi dou wa. Impressionnantes ! Ainsi, je m’attends à découvrir quelles seront mes onomatopées rythmiques et comment les utiliser, mais surtout à comprendre ce qui justifie leur choix. Pour cela, je pourrai m’entrainer à imiter un instrument : saxo ou percussions, par exemple.  

L’attitude, l’interprétation. 

Après Hiroshima, les musiciens avaient compris aussi vite que quiconque que la bombe de Truman avait tout changé et que seuls le scat et le be-bop parvenaient à dire comment”.

Home – Toni MORRISON

Le scat est une interprétation sans mot, une traduction de la réalité sans nommer ; c’est une description sonore. Je m’attends à ce que l’on aborde la question de l’interprétation et de l’intention.  L’écrivaine Toni MORRISON parle ici de la puissance d’un langage sans mot face à la nouveauté choquante de l’horreur. Il fallait quand même s’exprimer, décrire et figurer. Quelle est la disposition psychologique et l’attitude au moment où l’on scatte ? D’autant plus que le scat est humoristique et qu’on dit qu’il n’y a pas de scat triste. Là, j’aurai besoin d’être guidée, de lâcher prise et de ne pas trop me prendre au sérieux.

3) Si je scatte enfin c’est parce que…

J’écoute et je réagis. Créativité !

Je sais écouter et je peux réagir. Un monde s’ouvre à moi. La suite d’accords jazz et la structure rythmique sont un terrain de jeu !  Il s’agit d’écouter les accords, jouer sur le rythme et décider d’un phrasé puis réagir à l’ambiance musicale et délivrer une histoire sans mots. Je découvre mon style à travers mes onomatopées. Je me construis un langage. Finalement, le scat est une affaire de réactivité !

Je suis libre.

Je constaterai en maîtrisant un premier scat qu’un sentiment de liberté s’empare de moi : je ne reste pas sans réponse !  Je sais où et comment débuter et m’arrêter, et faire disparaître cette crainte qui s’apparente à celle de la page blanche de l’écrivain. Et c’est là le point le plus important : comment s’affranchir de la peur du vide et d’être ridicule ? C’est cette angoisse qu’il faut taire et c’est une réponse que l’on vient chercher dans un cours de scat. Savoir commencer et finir, en toute aisance et liberté. Finalement, je suis libre car je sais ne pas rester sans réponse, tout en restant à l’écoute.

Le scat est un acte de connaissance de soi à travers la description du monde. En abordant son apprentissage, c’est moi-même que je recherche : mes possibilités d’expression à travers ce style propre au jazz. Je pousse la porte, ça va commencer.

N’hésitez pas à partager vos commentaires, vos attentes vis-à-vis de votre premier cours de scat. Qu’attendez-vous de votre premier cours de scat ? Je lirai avec grand intérêt vos commentaires. 

Karine

Karine a également interviewé Docteur Jazz 😉

Laissez un commentaire !