Interview de David Sauzay

Saxophoniste, flûtiste et pédagogue, David Sauzay est une figure du jazz Français. Docteur Jazz a voulu en savoir un peu plus avant de l’inviter pour le stage de Rythmique organisé à Angers en octobre prochain.

david Sauzay

DJ : Bonjour David, peux-tu te présenter ?

DS : Né en 1972,  je débute le saxophone à l’âge de 8 ans dans la classe de Roger Michel-Frederic à Villefranche sur Saône. En 1988, lors d’un échange avec l’école de musique de Doncaster en Angleterre dirigé par John Ellis je décide de devenir musicien de jazz. J’étudie alors au conservatoire de Lyon, à l’EMN de Villeurbanne avec Gilbert Dojat et à l’AIMRA avec Jacques Helmus.

J’ai eu la chance de rencontrer et de travailler avec Mulgrew Miller, Tete Montoliu, John Abercrombie, Tim Ries, les big bands d’Albert Mangelsdorf et Carla Bley. En 1994, je suis membre actif du Collectif MU (créé la même année). Ce collectif de musiciens se rassemble pour jouer toutes les nuits dans une cave à Macon qui deviendra le Crescent Jazz Club composé de Francois Gallix, Eric Prost, Philippe Garcia, Gael Horellou, Laurent Sarrien, Laurent Courthaliac, Jean-louis Bonneton, Emmanuel Borghi, Fabien Marcoz et moi-même. Ce Collectif remporte le 1er prix du concours international de Jazz à Vienne en 1995 et le 1er prix du concours de la Défense en 1996. En parallèle , je joue dans l’ORJ de Grenoble dirigé par Gilles Lachenal et le Quintet de Simon Goubert avec Michel Grallier.

En 1997, je crée mon propre Quintet avec Gaël Horellou, Laurent Courthaliac, Clovis Nicolas et Philipe Garcia avec lequel nous avons enregistré en Espagne pour le label Fresh Sound Records (Jordi Pujol). En 1998, je fais parti du collectif des nuits blanches au Petit Opportun à Paris et joue dans le quintet de Laurent Courthaliac avec Olivier Témime, le sextet de Pierre Drevet et participe à l’enregistrement du CD de Charles Aznavour « Jazznavour ». En 1999, j’intègre le big band Belmondo/Dal Sasso et joue aussi avec Manuel Rocheman aux côtés de Kyle Eastwood pour la promotion de son CD en France. En 2001 Le Banneville/Sauzay Quartet invite Mino Cinelu pour plusieurs concerts au festival de Coutances.

J’accompagne aussi des chanteurs et chanteuses tels que  : Lauren Kinhan et Peter Eldridge (New York Voices), Maurey Richards, Manu Leprince, Rosemary Philips, Margault Lampley…

Curieux de nouveautés, je participe aussi à des projets de musique actuelle avec Laurent Dewilde electro sextet et Cosmik Connection.

En 2006, je suis finaliste du concours de Jazz à Juan les Pins. Entre 2006 et 2012 j’enregistre la musique de Jean Musy pour les téléfilms « c’était ça la vie » et «Le temps du silence» avec Lio pour France2 où l’on me voit aussi jouer à l’écran en tant qu’acteur !

Avec Thierry Lalo, je participe au Quartet de Jazz & Choeur d’enfants sur « Le joueur de flûte d’Hamelin» et « Boulevard du swing » en collaboration avec le CREA.

J’enregistre le 30 novembre 2011 «Meeting Harold Mabern» avec une rythmique new-yorkaise (USA) : Harold Mabern (Piano), Joe Farnsworth (Drums) John Webber (bass).

2012/2014  Projet ciné – concert sur «Ascenseur pour l’échafaud» avec le trio invite, création d’un Opéra jazz sur « Pinocchio » par Thierry Lalo et « Somewhere » avec le CREA. Projet ciné concert sur le film « Shadows » de John Cassavetes.

Ciné concert sur « The Cure » de Charlie Chaplin et sur « les 3 âges » de Buster Keaton. De 2014 à 2016 je joue dans  l’Octet du  saxophoniste Luigi Grasso.

En leader, je sors le disque “Playing with David Sauzay”, avec Fabien Mary et Alain Jean-Marie.

J’enregistre avec Laurent Courthaliac Octet « Music from Woody Allen movies », ainsi que l’album « Nice & easy » avec le chanteur italien Walter Ricci .

De 2018 à 2020 je joue avec Sarah Mc Kenzie Sextet au ténor à la flûte traversière, et la flûte en Sol. Je joue avec Fabien Mary (Album 2021, Fabien Mary Octet « left arm blues » (album 2018), avec les Voice Messengers dans « Comme le temps passe » (album 2021) et « Too short » avec le Vintage Orchestra.

 En tant que sideman, j’ai enregistré plus d’une quarantaine d’albums.

J’ai  joué avec Steve Grossman, Alain Jean-Marie, Michel Hausser, Philippe Soirat, Luigi Trussardi, Kenny Wheeler, Georges Arvanitas , Charles Bellonzi, Peter King, Maurice Vander, Antonio Farao, Michel Graillier, Michel Zénino, Emmanuel Bex, André Ceccarelli, Christian Escoudé…

DJ : Quelles sont tes principales influences ?

DS : J’ai commencé à jouer du jazz dans les années 90, mes héros étaient Charlie Parker (le film Bird de Clint Eastwood est sorti quand j’étais adolescent), David Sanborn, Grover Washington, Michael Brecker, bob Berg, Bob Mintzer. Puis je suis passé à John Coltrane, Wayne Shorter, Joe Henderson, Stan Getz et Sonny Rollins. Mon oreille s’est affiné avec le temps et j’ai enfin apprécié Lester Young, Coleman Hawkins, avec évidemment tous les Eddie Harris, Johnny Griffin, Dexter Gordon, Gene Ammons… Mais c’est surtout Hank Mobley qui a attiré mon attention car j’entendais dans son vocabulaire tout ce que j’aimais (le son « blue note »!). Ensuite j’ai été fan des saxophonistes de mon époque : Seamus Blake, Chris Potter, Joshua Redman. Le label Criss Cross était très en vogue et on découvrait toujours des nouveaux talents du genre de Javon Jackson, Jerry Weldon …

Et à 24 ans, j’ai eu le coup de foudre pour Eric Alexander, je l’ai rencontré souvent, j’ai jammé plusieurs fois avec lui ! Il incarne la tradition et la modernité des ténors d’hier et d’aujourd’hui. Son univers m’a ouvert la voie vers d’autres ténors que j’adore et qui me guident toujours, Grant Stewart, Harry Allen…

DJ : Un mot ou une phrase pour définir le jazz ?

DS : « Le jazz est un art de vivre », un art  qui nous pousse à être curieux, à être ouvert aux autres, à aimer partager son savoir. C’est une introspection permanente pour vivre en harmonie avec un monde qui change sans arrêt et auquel il faut sans cesse s’adapter.

Et une deuxième phrase concernant l’improvisation :

« L’improvisation en jazz, c’est raconter l’histoire de sa vie en musique » 

DJ : Si tu étais un standard ?

DS : J’aimerais être une infinité de standards, un de mes favoris est  « Autumn leaves », qui sublime les subtilités des standards : une mélodie magnifique et une harmonie parfaite.

DJ : Parle-nous de ton activité de pédagogue. Comment conçois-tu l’enseignement du jazz, et quels sont tes concepts pour l’aborder ? Je crois comprendre que nous avons un peu la même vision, celle de l’importance de l’oralité et de l’interaction…

DS : Depuis de nombreuses années, je travaille sur la compréhension de l’improvisation.

j’ai développé une méthode aussi bien adaptée aux musiciens amateurs qu’aux musiciens professionnels.

Le but est que chaque convive trouve du plaisir à jouer avec les autres, sans jugement : « je peux jouer ce que j’entends et je progresse en utilisant des outils utiles et créatifs »

Un travail de l’improvisation basé sur la pratique pour comprendre la théorie.

la transmission du savoir par l’oralité, partant du principe que ce que l’on a compris physiquement reste implanté dans la mémoire.

Partager le savoir avec des gens de niveaux différents pour faire comprendre le système des bases : plus je répète les fondamentaux plus j’élargis mon domaine de compréhension.

Ici la répétition est un jeu rythmique : « je dois impulser du rythme et faire vivre des phrases mélodiques ou des éléments harmoniques »

L’effet de groupe est d’encourager, de motiver, fraterniser et de créer des liens.

Chaque personne apprend à son rythme et tout le monde s’améliore !

Il y a dans l’enseignement du jazz beaucoup d’idées inversement proportionnelles à la réalité de cette musique : comme toute forme d’art, il faut connaître les principes de bases et le langage pour trouver sa propre voie mais avant tout ce sont les interactions avec les autres musiciens qui nous font le plus souvent progresser (une phrase, une idée, un principe, une philosophie)

J’ai créé une chaine YouTube pédagogique « Jazz et improvisation », plus d’une centaine de vidéos et de pdf pédagogiques.

Je participe à l’organisation de Master class et stages de jazz tout au long de l’année.

j’ai publié également 2 méthodes pédagogiques papier.

J’ai suivi les Master Class internationales du maitre Barry Harris  pendant 10 ans (improvisation et harmonie avec des musiciens de tous les pays) et je perpétue avec bonheur la philosophie de cet enseignement dans mes ateliers.

DJ : Quels sont tes projets ?

DS : Actuellement je finalise le travail d’un nouvel album, « featuring » avec Gabriel Sauzay à la contrebasse, Paul Morvan à la batterie, Hiroshi Murayama au piano. Un projet mené pendant toute la période du confinement, 10 compositions originales qui mélangent l’univers de chaque musicien.

Je développe également un répertoire original en trio (Orgue, sax & batterie) avec Laurent Marode et Stéphane Chandelier (sortie d’album à l’automne).

Je travaille aussi sur la parution mensuelle d’un document papier avec différentes rubriques pour une approche pédagogique complète et interactive. ( travail sur un standard, technique instrumentale, histoire d’un musicien, l’album du mois…)

DJ : Merci David, Docteur Jazz a hâte de t’accueillir pour ce stage de rythmique jazz des 22 et 23 octobre 2022

Le site pédagogique de David Sauzay

One thought on “Interview de David Sauzay

  • 4 août 2024 at 9:23 PM
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    2  »docteurs » representants remarquables de la vulgarisation jazz improvisation
    Merci à eux vraiment

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