Pianiste, compositeur arrangeur et vocaliste d’une grande culture et au langage sensible, Franck Amsallem est né en 1961 à Oran et a grandi à Nice. Son parcours est impressionnant et mérite que l’on s’y attarde… Il répond aux questions de Docteur Jazz…
Présente-toi
Pianiste de jazz, arrangeur occasionnel puisque n’écrivant plus beaucoup, chanteur frustré.
Expatrié n’ayant jamais tranché entre la musique noire et les excès de la table bien de chez nous.
Quels sont les arrangeurs qui t’ont le plus influencé ?
Dans l’ordre : Bob Brookmeyer, Bela Bartok, Thad Jones, Gil Evans & Igor Stravinsky.
Quel est le projet d’écriture dont tu es le plus fier ? ton préféré ?
Nuits pour Orchestre à cordes, section rythmique et soliste de Jazz. Jamais enregistré dans une version satisfaisante, mais je l’espère « in the future ».
Une phrase pour définir l’écriture
Ne pas se tromper de cible, ce n’est pas forcément écrire pour la postérité, mais plutôt écrire quelque chose qu’on a envie de réécouter.
Quel est l’arrangement qui n’est pas de toi et que tu aurais aimé écrire ?
« Thank You » de Jerry Dodgion
Quels sont tes projets ?
Jouer et écrire des arrangements pour quatuor à cordes dans un projet à venir avec chanteuse. Jouer et recommencer à écrire pour moi dès que la vie reprendra…
Anecdote personnelle
En juin 1989, j’étais en très bonne compagnie avec d’autres arrangeurs-compositeurs émérites (Kenny Berger, Ed Neumeister, Glenn Mills, Frank Griffith, Pete Mc Guinness), en train d’écrire une composition originale pour l’orchestre de Mel Lewis lors d’un stage organisé par BMI (le premier « BMI Workshop », devenu depuis une institution New-yorkaise).
Nous devions tous « pondre » un opus pour cet orchestre que nous adorions, LA référence absolue à NYC et ailleurs. Un long concert s’annonçait en perspective, avec des musiciens dans l’orchestre ayant plus ou moins envie de jouer le jeu. Mel, très malade, était comme souvent d’une humeur massacrante, et décida lors de la deuxième répétition qu’il ne se sentait pas de jouer toute cette musique, pourtant écrite spécialement pour lui. On sentait bien qu’il désapprouvait tout cet exercice, pourtant chapeauté par ses amis Brookmeyer et Manny Albam. On appela Danny Gottlieb pour le remplacer (En lecture à vue, bonjour…), mais Mel resta pour écouter tout le concert et joua même un morceau qu’il trouvait plus « civilisé ».
On (du moins moi) s’était donné beaucoup de mal pour écrire quelque chose spécialement pour lui, chose que tout arrangeur doit garder à l’esprit au lieu d’écrire un hypothétique concerto pour cobaye en souffrance. Il m’avait déjà rencontré auparavant et complimenté sur mon travail. Je l’ai approché à la fin du concert et il m’a dit : « Your chart was GREAT, GREAT ! up until it went into multiple-meters (…!).
Je lui ai répondu… »euhhhhhhh enfin…. C’était tout en 4/4, juré, craché… ». Il me regarda, toujours aussi sévère « you know what I mean, it sounded like it was in odd-meters ». Et avant que je ne puisse lui répondre, il me dit : « Look, odd meters are a bad thing. Very bad. Don’t do it, don’t go there. Look what it did to Don Ellis : He died from it ». Sans me laisser le temps de lui répondre, il s’en alla.
Trente ans après j’en suis toujours bouche bée.
6 mois plus tard, il s’en alla rejoindre Thad au paradis des bandleaders qui swingueront « no matter what ».
https://soundcloud.com/sallemjazz/effeminate-meanderings
https://soundcloud.com/sallemjazz/un-chanson-douce-henri-salvador
Un grand Bravo Franck Amsallem pour ce bel et riche arrangement que j’ai pris plaisir à découvrir. Votre écriture est superbe.
Hein !? T’as vu ? On ne présente pas n’importe qui sur Docteur Jazz !… ;-). Plus sérieusement, il fait pour moi partie des gens dont le travail n’est pas suffisamment mis en valeur… Alors voilà !